AVIS DU CCE SUR LE PROJET DE SCHEMA INDUSTRIEL DU LEARJET 85

(avis daté du Le 31 janvier 2014)

Le CCE doit une fois de plus rendre un avis sur un schéma industriel qui concerne encore un transfert d'activité vers un pays à bas coûts salariaux.

Bien plus que le transfert d'activité, c'est notre avenir et notre savoir faire que vous délocalisez !

Alors, où allez-vous vous arrêter !! Car on le voit bien aujourd'hui, tous nos développements sont concernés par ces délocalisations, sur l'autel de la soi disant "compétitivité".

Pour la direction générale d'AIRCELLE, le seul raisonnement qui soit est : "Pour être compétitif, il faut baisser le coût du travail".

Alors nous vous posons la question messieurs de la direction :

Est-ce que la compétitivité d'une entreprise n'est liée qu'aux coûts salariaux ?

Car si oui, nous pouvons vous donner un conseil, mettez nos productions au Bangladesh ou en Ethiopie, vous gagnerez du temps !!

Nous pensons que vous êtes guidés par une mode, plus que par de réelles justifications économiques.

 Tout d'abord, macro-économiquement : 

• Quel est l'intérêt de délocaliser des activités dans des pays comme le Maroc et la Chine, alors que l'on n’exporte pas nos produits dans ces mêmes pays ?

• Quel est l'intérêt pour l'état Français, qui est le 1er actionnaire du groupe Safran, donc d'AIRCELLE, de délocaliser nos fabrications de nacelles alors que cela ne participera pas à inverser la courbe du chômage, ni à permettre d'améliorer notre balance commerciale ?

Ensuite, micro-économiquement :

• Est-on sûr de la rentabilité pour Aircelle de la délocalisation du LEARJET ?

Beaucoup d'incertitudes règnent encore sur ce sujet, et pour nous il y a des coûts cachés dans cette délocalisation comme par exemple :

• •  manque de main d’oeuvre qualifiée
  •  sous-estimation des défauts de qualité
  •  forte concurrence entre entreprises qui délocalisent (turn-over important et salaires croissants)
  •  sous-estimation des coûts de logistique (nul besoin de préciser que l’augmentation des cours du pétrole va accroître considérablement les coûts de transports de marchandises)
  •  sous-estimation des écarts culturels
  •  sous-estimation des frais de management
  •  sous-estimation de la gestion du projet
  •  sous-estimation des voyages qui seront consacrés au projet de transfert
  •  sous-estimation de la formation
  •  qualité des infrastructures du pays (route, réseau, téléphone, Internet…)
  •  productivité de la main-d’oeuvre locale
  •  sous-estimation du temps de mise en place du site chinois pour qu'il fonctionne de manière optimale,
  •  éloignement des clients finaux (le site chinois est environ 3000km plus loin du site Américain que le site Français ne l'est!)
  •  loi locale mal connue, etc

Aujourd'hui les coûts salariaux d'AIRCELLE ne représentent que 10% environ des coûts de production. Au regard de ces 10%, de l'intérêt pour les actionnaires principaux que sont l'état Français et les salariés du groupe SAFRAN et des coûts cachés des délocalisations, force est de constater que la justification économique de cette délocalisation est loin d’être aussi évidente que la direction générale d'AIRCELLE le laisse croire.

La seule certitude que nous ayons est que ce projet, s'il est mené à terme, ne créera pas d'emploi en France, voire pire car il affaiblira à moyen/long terme le tissu productif français!

En agissant ainsi au nom de la concurrence internationale, vous contribuez et vous êtes complice de l'appauvrissement de la population française, ainsi qu'à la désindustrialisation de notre pays.

Pour toutes les raisons expliquées, les élus du CCE émettent un avis défavorable.